L’actualité nous invite à nous poser une question essentielle : Comment prévenir la violence ? Une des mesures les plus préventives qui soit est l’éducation mais on peut légitimement se poser la question de savoir si l’éducation de chacun viendra à bout de la violence. Bien tristement, l’histoire nous enseigne que ce sont les personnes les plus instruites dans les pays les plus développés qui ont fait preuve du plus de cruauté dans ce monde.
C’est que l’éducation est à différencier de l’instruction… au-delà du savoir, il s’agirait donc de transmettre certaines habilités, permettre de développer certaines compétences et satisfaire les besoins psycho-sociaux essentiels des enfants pour éduquer à la paix. Diminuer la concurrence trop présente serait déjà un premier pas quand on se dit qu’être en concurrence c’est déjà un peu se faire la guerre…
L’idée serait alors de promouvoir une éducation qui développerait l’estime de soi et la confiance, mais surtout l’appartenance, l’empathie et la solidarité; des ingrédients que l’on retrouve dans les activités coopératives.
Afin de prévenir la violence omniprésente dans les écoles, Michelle Waelput et Delphine Druart 1)Michelle Waelput est psychopédagogue et Delphine Druart est inspectrice cantonale encouragent l’instauration de méthodes coopératives dans les groupes classes, sous forme de jeux dits de coopération. En effet, instaurer de telles méthodes d’apprentissage a pour effet d’améliorer l’ambiance de classe et de ce fait, diminuer la violence entre pairs.
De plus, « Apprendre la coopération dès le plus jeune âge atténue les conflits, régule les tensions, assure une meilleure compréhension de l’autre, enrichit les interactions sociales et améliore les compétences cognitives des enfants.» 2)M. Waelput et M. Druart, « Coopérer pour prévenir la violence », De Boeck, 2009.
Mais instaurer une telle pédagogie requiert certains préalables.
En effet, le premier outil utilisé est le dialogue : pour mettre des mots sur ses émotions et sentiments, sur le sens que l’on donne aux comportements et développer ainsi l’estime de soi et l’empathie. Dialogue pour répondre à la violence (plutôt que d’utiliser la punition). Dialogue aussi pour régler les conflits ; Enfin, dialogue pour créer un climat sécurisant, pour aborder le cadre du vivre ensemble…
À travers la coopération, l’enseignant peut ainsi promouvoir certaines valeurs indispensables telles le respect, l’entraide, l’ouverture, la solidarité mais aussi développer la plupart des habiletés sociales que sont :
Terry Orlick définit 4 facteurs psychosociaux déterminant les activités de nature coopérative :
La solidarité est la base de toute coopération. Chaque participant est important ; il est considéré avec ses compétences.
Ce qui nous importe le plus dans un jeu de coopération ce n’est pas le résultat final mais bien le processus mis en œuvre par chaque participant au sein du groupe pour atteindre le but final.
Il est également important de préciser que la notion de plaisir doit rester au centre de tous les autres objectifs !
Remarquons que les travaux de groupe sont aussi un bon moyen d’amener les enfants à coopérer : Le travail en groupe permet aux enfants de résoudre une tâche en co-construisant la solution. Non seulement les interactions entre les enfants favorisent leur socialisation (ils doivent donner leur opinion, argumenter, organiser un travail en commun, trouver leur place, prendre en compte les autres, …) mais de plus, le rôle constructif de ces interactions entre pairs dans le développement cognitif est souligné et ce si ces interactions sont symétriques. 3)Pourtois et Desmet dans l’Education Postmoderne, Editions PUF, 2002
Le rôle de l’enseignant, primordial, est d’assurer la symétrie des relations (relations égalitaires) : il devra veiller à la participation de tous, à ce que le groupe trouve un moyen de prendre des décisions et qu’il les respecte.
Il est certain que les équipes ne vont pas suivre à la lettre les attentes établies mais apprendre à bien s’entendre est un apprentissage qui prend du temps et requiert de la patience. Amener les enfants à travailler en équipe, à partager leurs idées et s’enrichir de cette co-construction leur servira toute leur vie.
Que ce soit après un groupe de travail coopératif ou un jeu coopératif, il est essentiel de débriefer. Le débriefing est un moment qui permet de réfléchir sur ce que les enfants viennent de vivre (comment ça a fonctionné ?), de mettre des mots sur les ressentis. Cela permet aussi de renforcer les apprentissages, en réfléchissant aux stratégies les plus aidantes.
La mise en place d’activités de coopération semble être un pas à franchir mais n’est sans doute pas suffisant pour endiguer la violence. La coopération doit inspirer le modèle éducatif, tant à l’école qu’à la maison. Une éducation ferme et bienveillante 4)Jane Nelsen, La discipline Positive, Edition du Toucan, 2012 s’inspire du modèle coopératif, en ce sens qu’il met en avant le rapport égalitataire 5)Jean-Paul Gaillard, Enfants et adolescents en mutation, Editions ESF, 2014 (et non pas le rapport de soumission/domination), le développement de l’estime de soi et l’empathie (par l’écoute, l’encouragement et le dialogue), la responsabilisation des enfants et la recherche de solution en cas de « mauvais » comportement (plutôt que la punition).
References
1. | ↑ | Michelle Waelput est psychopédagogue et Delphine Druart est inspectrice cantonale |
2. | ↑ | M. Waelput et M. Druart, « Coopérer pour prévenir la violence », De Boeck, 2009. |
3. | ↑ | Pourtois et Desmet dans l’Education Postmoderne, Editions PUF, 2002 |
4. | ↑ | Jane Nelsen, La discipline Positive, Edition du Toucan, 2012 |
5. | ↑ | Jean-Paul Gaillard, Enfants et adolescents en mutation, Editions ESF, 2014 |